A la table du monde – le Mafé

LA PETITE HISTOIRE DU MAFE

L’origine sénégalaise

La base du mafé est la sauce à l’arachide, un produit arrivé dans l’espace africain à partir du XVIe siècle par l’intermédiaire de la présence portugaise sur les côtes. Son essor est dû à l’abolition de la traite d’esclaves. Aujourd’hui, le Sénégal, le Nigeria et le Soudan se partagent la majorité de l’exportation d’arachides sur le continent [1]. Après sa culture, l’arachide est broyée puis cuite. On ajoute alors un peu d’eau pour fluidifier la sauce et du sel. En Afrique de l’Ouest, c’est un incontournable et chaque pays compose autour de cette base : tigua dégué au Burkina, taushe au nord du Nigeria… Le mafé se caractérise, outre la sauce, par la présence d’une viande (mouton, bœuf ou poulet), d’ails et d’oignons, de concentré de tomates et l’ajout facultatif d’un féculent (le riz la plupart du temps) et de légumes. À savoir qu’il se consomme majoritairement à la cuillère de nos jours. Raconter l’origine du mafé est difficile compte tenu du peu de sources écrites disponibles. En effet, c’est la culture orale qui est majoritaire.

Une mondialisation limitée ?

Le mafé s’est exporté vers l’Europe avec la colonisation française. En 1895, la France qui avait déjà installée le chemin de fer dans la région, crée la colonie d’Afrique Occidentale Française. Après l’indépendance de ces pays en 1960, on note de nombreux mouvements migratoires vers l’Hexagone (17 787 ressortissants en 1962 contre 393 289 en 1999). La circulation du mafé a débuté grâce à l’arrivée de Sénégalais en France. C’est à ce moment que le plat sort d’Afrique et qu’il a su changer de forme pour s’adapter aux régimes occidentaux, en version végétarienne par exemple. Le plat sénégalais n’est pas un « champion » de la mondialisation comme la pizza et sa diffusion mondiale est encore très limitée. Malgré cela, le mafé conserve sa réputation de locomotive de la cuisine africaine.

Le « boum » de la cuisine africaine

Bien que son succès soit apprécié par les chefs d’origine africaine, cette cuisine reste trop souvent résumée selon eux à quelques plats dont le riz jollof et le foufou. L’essor progressif des plats africains se fait grâce à deux facteurs. Le premier est l’attrait pour l’exotisme dans les assiettes. La découverte de nouveaux produits tels que le manioc est donc appréciée. Le deuxième facteur est l’action de chefs engagés pour faire reconnaître leur cuisine : Mory Sacko s’est vu attribuer à seulement 28 ans une étoile au Guide Michelin. Sur la plateforme TikTok, devenu un excellent support de diffusion de recettes, Niang Cook atteint les 700 000 abonnés. Anto Cocagne, d’origine gabonaise, a, quant à elle, utilisé d’autres supports de communication comme la télévision et a même créé le festival We Eat Africa. Les cuisines africaines, encore trop méconnues, font donc face à un double défi : accentuer la reconnaissance institutionnelle et s’intégrer sur les tables du monde entier.

Notes

[1] Chiffres de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture)

[2] Recensement de la population : population immigrée, population étrangère, Mars 1999, Paris, Institut National de la Statistique et des Études Économiques, 2001.

LA PHOTO

Pierre Thiam est un immigré sénégalais qui s’est rendu aux États-Unis afin d’étudier la chimie. Pour payer ses études, il travaille dans les cuisines new-yorkaises et devient un chef reconnu. En 2001, il ouvre son propre restaurant. L’énergie qu’il met pour faire connaître les produits ouest-africains est impressionnante : il publie régulièrement des ouvrages, présente des conférences, organise des voyages culinaires, crée le festival AfroEats au Sénégal… Son militantisme est un modèle pour toute une génération de jeunes chefs désireux de faire connaître les spécialités et pratiques culinaires africaines.  

Photo réalisée par Sara Costa, 30 Avril 2019, source: Pierre Thiam Group tous droits réservés. 

LA CARTE :

Où manger du mafé à Nantes ? Carte des restaurants, grandes surfaces, food trucks et CROUS recensés sur Google Maps et Tripadvisor. (ne comprend pas les boulangeries et distributeurs) Réalisation: Jules Bernard

LA RECETTE : https://www.tiktok.com/@niangcook/video/7082777690851396869?is_copy_url=1&is_from_webapp=v1

POUR ALLER PLUS LOIN : Sur cette page Facebook, vous retrouverez la programmation, les invités et les valeurs du festival de cuisine africaine We Eat Africa! https://www.facebook.com/WeEatAfrica/

Bibliographie

BAROU Jacques, “Les immigrations africaines en France au tournant du siècle”, Hommes et Migrations, n°1239, 2002, p. 6 à 18.

BRUNET-RIVAILLON Hélène, « On dit la cuisine africaine trop grasse, pas assez subtile… Alors que c’est le contraire ! Interview d’Anto Concagne, L’OBS [en ligne], 2018. 

URL:https://o.nouvelobs.com/food/20181008.OBS3560/on-dit-la-cuisine-africaine-trop-grasse-pas-subtile-alors-que-c-est-le-contraire.html [consulté le 04/11/2022]

McCANN James, Stirring the Pot, A History of African Cuisine, Athens, Ohio University Press, 2009. 

MENDY Renée et ATOU DIAW Papa, « Gastronomie : les cuisines africaines à la conquête des assiettes françaises », BBC NEWS AFRIQUE  [en ligne], 2021.

URL:https://www.bbc.com/afrique/59375874 [consulté le 04/11/2022]

MEYER MAHIEU Aurore (réalisatrice), “Histoires de Ndolé, thiéboudiène et yassa”, Bouffons n°33 [podcast], Nouvelles Écoutes, France, 2018. 

URL:https://podcast-radio.com/fr/podcast/bouffons/33-histoires-de-ndole-thieboudiene-yassa_e5b6164c124668# [consulté le 04/11/2022]

PEHAUT Yves, “L’arachide en Afrique occidentale”, Cahiers d’outre-mer, n° 179-180, 1992, p. 387-406.

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https://docs.google.com/document/d/13VXEXaySU47iWLDYazQgPOzdLyDgORcfne-4GA0759c/edit

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