LA PETITE HISTOIRE DU SUSHI
Naissance et diffusion dans le bassin pacifique
A l’origine, la pratique d’entourer le poisson de riz fermenté est une technique de conservation qui daterait du VIIIe siècle. Au XIXe siècle, apparaît le sushi tel que nous le connaissons, le nigiri sushi, avec le chef Hanya Yohei à Edo (ex-Tokyo) [1]. Cette forme devient un succès dans les rues de la capitale par sa rapidité d’exécution : il suffit de poser un morceau de poisson cru sur une base de riz vinaigré. Par la suite, le sushi suit les migrations des hommes d’affaires et travailleurs japonais des années 1840-1850 dans les pays de la zone Pacifique. Le mets arrive à Los Angeles, en 1940, grâce aux 37 000 immigrés japonais résidant dans la ville [2]. Sa diffusion est freinée car il n’est pas dans l’habitude des Américains de consommer du poisson cru.. Dans les années 60, la contre-culture californienne hippie apprécie de plus en plus l’idée jusqu’à ce que le California Roll soit créé [3]. En 1965 le premier restaurant de sushis ouvre à Los Angeles [4].
A la conquête du monde
La diffusion mondiale s’est d’abord faite à partir des populations favorisées. Le sushi a accompagné l’enrichissement de nombreux pays, dont la Turquie. Dans les années 60-70, il est un plat qui sert de distinction sociale à la nouvelle élite urbaine qui le consomme dans les hôtels de luxe. Sa diffusion a été intensifiée grâce à l’arrivée de la réfrigération dans les années 90. En France, le sushi est arrivé dans les années 70 par effet de mode, mais son succès date de la décennie 90. La France est le premier pays européen mangeur de sushi. La tendance mondiale est de rendre ce produit relativement cher, accessible au plus grand nombre en baissant son prix et en le proposant dans les grandes surfaces, comme l’illustre la réussite de Sushi Daily. Ce succès est à nuancer notamment à cause du problème de la surpêche. Le thon rouge est désormais remplacé par d’autres poissons car l’espèce est menacée. [5].
Un outil de « gastrodiplomatie »
Et si le sushi servait d’outil d’influence pour le Japon ? C’est ce que l’on appelle la gastrodiplomatie, c’est-à-dire l’action d’un État pour promouvoir sa culture alimentaire à l’international. Depuis les années 2000, la stratégie de soft power dite du « Cool Japan », dont l’alimentation est un volet majeur, est clairement affichée. L’objectif est de créer une demande à l’étranger pour augmenter la production industrielle dans le pays et s’enrichir. Pour mettre en place cette politique, plusieurs leviers ont été activés. Premièrement, la participation à de grands événements, notamment lors de l’exposition universelle de 2015 où le stand nippon a rameuté 2,5 millions de visiteurs [6]. Ensuite, la promotion d’autres pratiques culinaires de l’archipel que le sushi. Enfin, l’aide à l’ouverture de nouveaux restaurants dans le monde s’est soldée par une augmentation de ces derniers de 24 000 en 2006 à 117 000 en 2017 [7]. Tout ceci est encadré par des organismes officiels qui dépendent du ministère des affaires étrangères du Japon [8].
Notes
[1] PELLETIER Philippe, « Le Sushi », dans SINGARAVELOU Pierre et VENAYRE Sylvain (directeur de publication), L’Épicerie du Monde : la mondialisation par les produits alimentaires du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Fayard, 2022, p.276-280
[2] PELLETIER Philippe, « Le Sushi », dans SINGARAVELOU Pierre et VENAYRE Sylvain (directeur de publication), L’Épicerie du Monde : la mondialisation par les produits alimentaires du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Fayard, 2022, p.276-280
[3] Le california roll est un type de maki où une feuille d’algue, elle-même entourée de riz vinaigré, entoure un mélange d’avocat, crabe et concombre.
[4] PELLETIER Phillipe, « Le Sushi », dans SINGARAVELOU Pierre et VENAYRE Sylvain (directeur de publication), L’Epicerie du Monde : la mondialisation par les produits alimentaires du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Fayard, 2022, p.276-280
[5] voir site de l’ONG Wwf : https://www.wwf.fr/especes-prioritaires/thon-rouge
[6] FARINA Felice, « Japan’s gastrodiplomacy as soft power: global washoku and national food security », Journal of Contemporary Eastern Asia, n°17, 2018, p.152-167
[7] FARINA Felice, « Japan’s gastrodiplomacy as soft power: global washoku and national food security », Journal of Contemporary Eastern Asia, n°17, 2018, p.152-167
[8] un exemple de ces organismes est le Japan Food Products Overseas Promotion Center
LA PHOTO
Sur cette photo, on distingue un stand de cuisine japonaise à la Japan Expo de 2018. Le festival possède l’espace Washoku dédié à la cuisine. La convention dédiée à la culture pop nippone se tient à Paris tous les ans et rassemble des centaines de milliers de visiteurs (254 084 en 2022). Elle illustre la diversité des lieux où le sushi est consommé, ici un festival qui sert de fenêtre publicitaire à la fois à des marques de cuisine japonaise comme Tanoshi mais aussi à la cuisine japonaise. L’affluence à ce genre d’événement souligne à quel point la culture japonaise est une passion française, en particulier sa cuisine.
LA CARTE
Où manger un sushi à Nantes? Carte des restaurants, grandes surfaces, food trucks, CROUS recensés sur Google Maps et Tripadvisor. (ne comprend pas les boulangeries et distributeurs) Réalisation: Jules Bernard
LA RECETTE :
https://www.atelierdeschefs.fr/recettes/12447/sushi-de-saumon/
POUR ALLER PLUS LOIN :
Dans cet article, apprenez-en plus sur la stratégie du soft power japonais du Cool Japan autour du manga, la musique ou encore… l’alimentation!
https://www.journaldujapon.com/2022/01/27/cool-japan/
BIBLIOGRAPHIE
CAZAN Sandrine, « Sushis et Japan Food, quel est l’état du marché en 2020? » [en ligne], Toute la Franchise, 2020.
URL:https://www.toute-la-franchise.com/vie-de-la-franchise-A32305-sushi-japan-food-etat-marche-2020.html [consulté le 02/22/2022]
CORSON Trevor, The Story of Sushi: An unlikely saga of raw fish and rice, New York, HarperCollins, 2008.
FARINA Felice, « Japan’s gastrodiplomacy as soft power: global washoku and national food security », Journal of Contemporary Eastern Asia, n°17, 2018, p.152-167.
GOUTARD Julie, « le Sushi, un marché au bord de l’implosion » [en ligne], BFM Buisness, 2019.