Pendant ce temps-là en Afghanistan : l’ONU évite la famine en travaillant avec les Talibans

Depuis le départ des forces américaines et son exclusion du système international,  l’Afghanistan est en proie à l’instabilité et aux effondrements de l’économie et du système administratif. Menacés par une famine de grande ampleur, retour sur le contexte et le sauvetage de millions d’Afghans par l’action de l’ONU avec les Talibans. 

Alors que la guerre en Ukraine fait rage et que tout le monde s’intéresse au sort des réfugiés et combattants ukrainiens, l’Afghanistan est toujours aux mains des Talibans. Depuis le 30 août 2021, date du retrait des troupes américaines, les Talibans ont repris le pouvoir. La médiatisation a été importante, pendant plusieurs mois les médias en parlaient tous les jours, jusqu’à ce qu’une nouvelle crise apparaisse.

Soldats américains en Afghanistan

Pourtant, la crise en Afghanistan n’a pas disparu. L’ONU alerte dès août des risques de famine généralisée dans le pays. L’instabilité régnante empêche les services de fonctionner correctement et ainsi de prévoir des stocks de nourriture assez importants pour l’hiver. Le système de santé s’effondre empêchant les femmes d’accoucher en sécurité et avec les moyens requis. Le taux de mortalité infantile atteint 20% dès septembre. Le 5 décembre, on annonce le pays en famine effective. Un million d’enfants risquent la mort rien qu’avec les baisses de température et deux autres millions à cause de la faim selon l’ONU. 

Sur place, Médecins sans frontières installe des hôpitaux et constate la malnutrition ambiante. Les femmes n’arrivent plus à allaiter et les enfants en dessous de deux ans souffrent de malnutrition aiguë. En janvier, alors que commence la crise ukrainienne, c’est près de vingt trois millions de personnes qui sont touchées par la crise et l’urgence alimentaire selon les barèmes du Programme alimentaire mondial.

Enfant et femmes voilées à une distribution de naan (pain azyme)

En février, le pays fait état d’une perte de 80% de ses revenus, l’aide internationale dont il est dépendant a été coupée il y a quelques mois et l’économie ne parvient pas à fonctionner du fait de l’instabilité politique et des diverses mesures des Talibans. L’inflation augmente, les hôpitaux sont saturés tandis que les salaires eux sont inexistants ou drastiquement altérés. Le pays est à 90% agricole et suite à la crise, les mouvements de population ont été importants, empêchant la préparation des terres et ont entraîné la destruction des productions.  

Mais, le 2 mars 2022, Deborah Lyons, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), annonce que l’ONU et les organisations internationales ont permis de préserver vingt millions d’Afghans de la famine. En effet, 397 des 401 districts afghans ont bénéficié d’aide alimentaire. Les organisations ont travaillé directement avec les acteurs locaux mais également avec les autorités, de facto, les Talibans. 

 « Nous ne croyons pas pouvoir véritablement aider le peuple afghan sans travailler avec les autorités de facto » a déclaré la représentante, en soulignant toutefois que la situation politique n’est pas tolérée par les Nations Unies.

Deborah Lyons à l’ONU expliquant la situation afghane le 2 mars 2022

La MANUA alerte d’ailleurs sur la précarité du dispositif qui ne servira pas à grand-chose si la stabilité économique du pays n’est pas retrouvée prochainement. De fait, une réflexion sur la réintégration de l’Afghanistan dans le système international est en cours. A l’appui, l’injection directe de devise monétaire dans le pays a eu un effet positif et permis, pour un temps, de stabiliser certaines régions. Faute d’introduction de nouvelles devises, cette situation ne pourrait s’améliorer. 

La situation, si elle semble s’améliorer, risque néanmoins de mener une nouvelle fois à des risques de famine l’hiver prochain si rien ne bouge. Il est à craindre qu’avec la guerre en Ukraine, le sort des Afghans soit victime d’un désintérêt des organisations, États et surtout du grand public qui a beaucoup à jouer dans le traitement des crises humanitaires. Ce ne serait pas la première fois qu’une crise humanitaire soit délaissée par le grand public. En effet, la famine en Ethiopie de 1984-1985 a été délaissée par les médias alors qu’elle était loin d’être résolue…

Sources: 
https://www.lefigaro.fr/flash-actu/afghanistan-un-risque-de-famine-imminent-s-alarme-l-onu-20210925
https://www.liberation.fr/international/moyen-orient/en-afghanistan-la-faim-le-froid-et-leffondrement-20211205_AKXE3I7V4FB7FLKE3S3AVGYZSA/
https://www.liberation.fr/international/en-afghanistan-le-systeme-de-sante-seffondre-20211118_7SAGXUI6S5ES5POUBXELLSX27E/
https://fr.euronews.com/2021/10/26/l-afghanistan-face-a-la-famine-cet-hiver
https://www.lefigaro.fr/international/afghanistan-six-mois-apres-la-prise-de-kaboul-la-crise-humanitaire-et-sociale-persiste-20220217
https://www.ungeneva.org/fr/news-media/news/2022/03/afghanistan-une-famine-generalisee-pu-etre-evitee-grace-aux-agences
https://positivr.fr/afghanistan-famine-generalisee-evitee/
(Tous consultés le 3 mars 2022)

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