Présentation de Les Enfants du Paradis – romantisme, théâtre et histoire

    Affiche du film, issu du site Allociné(1)

Quoi de mieux qu’un film pour se reposer au chaud durant l’hiver ? Les Enfants du  Paradis n’a rien de la simplicité d’un film de Noël, mais il pourrait aussi vous emporter à un certain romantisme. Reconnu par la critique, il entre rapidement dans la culture populaire. Néanmoins, le film et son réalisateur, Marcel Carné, semblent aujourd’hui méconnus par les jeunes générations. Allons donc découvrir ce classique du cinéma français que l’article essaiera de présenter autour de trois axes : un film théâtral, romantique et historique.

Après un long tournage, de 1943 à 1944, malmené par les événements de la guerre, le film sort en avril 1945(1). Le réalisateur Marcel Carné et le scénariste, dialoguiste Jacques Prévert mènent le tournage et un casting flamboyant : Arletty, Marcel Herrand, Jean-Louis Barrault et Pierre Brasseur. La production mise sur un personnel de qualité et des moyens financiers importants que Marcel Carné exploite avec minutie pour les décors. Celui du «Boulevard du crime», surnom donné au XIXème siècle au «Boulevard du Temple» à Paris, a nécessité 35 tonnes d’échafaudages, 350 tonnes de plâtres, 500 mètres carrés de vitres pour 300 fenêtres(1). M. Carné explique dans plusieurs interviews que les scènes présentant le boulevard sont inspirées par ses recherches iconographiques au Musée Carnavalet, à Paris(2). Il y trouve des estampes représentant les jours de fête et une foule imposante que les premières images du film déploient. Ainsi, le plan large est utilisé et à plusieurs reprises. Les scènes de regroupements denses où s’esclaffe, converse, s’amuse tout un monde sont récurrentes. Elles participent à la volonté de créer une fresque historique vivante. Un autre thème important du film est son hommage au théâtre. La passion amoureuse tient une place centrale et s’enroule de tragédie. Puis, la part belle est donnée au dialogue. Le poète Jacques Prévert donne le verbe, il mêle astucieusement poésie et simplicité du langage. La caméra accompagne cet ensemble de sentiments et de paroles pour donner la priorité aux expressions personnelles.

Un romantisme théâtral. Mise en scène et sur scène, l’amour noue les intrigues et les personnages. Garance, jouée par Arletty, est au centre de l’attention. Carole Aurouet, spécialiste de Jacques Prévert, met en avant son rôle et le thème de l’amour(3). A côté de la liaison entre Garance et Baptiste, le scénariste Prévert développe des « intrigues périphériques qui lui permettent de présenter toutes les formes d’amour » dans lesquelles la belle est toujours impliquée. Mais seule sa passion pour le pantomime l’éprend sans cesse. Cette relation se joue dans les cœurs des intéressés et dans les pièces de théâtre auxquelles ils participent. La réalité se confronte à la fiction et Baptiste est peut-être maître sur scène mais ses relations réelles lui échappent. En bref, le film met en parallèle l’amour et le théâtre par un jeu sur les persona.

Les Enfants du Paradis peut être aussi regardé comme une véritable fresque historique. Une peinture en deux tableaux : une première partie intitulée « Le Boulevard du crime », longue de 95 minutes, et une seconde partie intitulée « L’Homme blanc », longue de 87 minutes. Les scénaristes ont voulu représenter une réalité historique, celle du Boulevard du temple. Ce haut lieu du théâtre accueille les représentations de pantomimes et de mélodrames, dans la rue ou à l’intérieur, mélangeant amateurs de l’art à une masse grouillante et bruyante. Les trois personnages masculins principaux ont bien existé. Tous ont marqué la vie parisienne des années 1820 et 1830. Ce très long-métrage – plus de 3h – permet de rendre perceptible la diversité de l’époque et ses figures, idéalisées par Carné et Prévert. D’ailleurs, la paire semble reprendre dans la création de Les Enfants du Paradis la figure typique de l’artiste des années 1820 : le révolutionnaire romantique. Ses caractéristiques sont omniprésentes. Le rêve d’évasion, la tension vers le plaisir, une énergie folle qui pousse à la subversion, à l’action. La passionnante et passionnée Garance fait l’apologie de la liberté. Elle la mêle à l’amour et la décrit chère et belle.

La critique fait de ce film l’un des meilleurs du cinéma français. Il évoque le théâtre, met en scène des histoires parisiennes, effleure la philosophie, utilise le langage avec finesse ou encore déploie un peuple. Maintenant, à vous d’apprécier et de lever le rideau sur le Boulevard.

  1. https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=182.html – Fiche film Les Enfants du paradis, du site allociné
  2. https://youtu.be/BM34aAdzZ8s – « Parlons cinéma | MARCEL CARNÉ », entretien entre un journaliste de TFO (Chaîne culturel d’Ontario) et Marcel Carné
  3. https://www.franceculture.fr/emissions/les-chemins-de-la-philosophie/marcel-carne-et-jacques-prevert-14-les-enfants-du-paradis-cest-tellement-simple-lamour – Emission France Culture « Les Chemins de la philosophie » du 31 décembre 2018

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